Projet santé pour tous


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L’amélioration des systèmes de santé des pays en développement passe, outre les problèmes de ressources humaines et financières, par la production d’une offre de biens et de services de santé de qualité. Cela comprend à la fois l’amélioration des systèmes d’approvisionnement et de distribution en médicaments et vaccins, la construction ou réhabilitation d’infrastructures de santé, l’organisation générale des soins, les réformes hospitalières, la contractualisation et les « partenariats public privé ».

Les enjeux de l’offre en biens et services médicaux

Un accès insuffisant à des médicaments de qualité

La disponibilité des médicaments essentiels à faible coût est l’une des cibles des Objectifs du Millénaire pour le Développement. Si l’accès aux médicaments essentiels génériques s’est amélioré ces vingt dernières années, de nombreux problèmes demeurent. La moitié de la population africaine n’a toujours pas accès aux médicaments. La part du marché du médicament en Afrique, qui s’est fortement dégradée depuis les années 70, reste marginale (1% du marché mondial pour 12% de la population totale).

En lien avec les pratiques très répandues d’automédication, conséquences de la cherté et de la mauvaise qualité des services, le marché illicite du médicament s’est considérablement développé ces 15 dernières années (dans certains cas, il représente jusqu’à 60% des ventes de médicaments). De véritables marchés de contrefaçons ont également proliféré, multipliant les risques autant individuels que collectifs. En outre, si le secteur public d’approvisionnement et de distribution a globalement amélioré sa performance grâce à la création de centrales nationales d’achat et de distribution aux statuts indépendants, des problèmes de gestion et de détournement subsistent dans de nombreux pays.

Enfin, moins de 10% des ressources de la recherche ciblent les maladies du Sud, qui représentent pourtant 90% des problèmes mondiaux de santé. Au cours des 30 dernières années, 1556 nouveaux produits ont été introduits sur le marché mais seulement 21 d’entre eux ont concerné des maladies affectant principalement les pays du Sud.

Différentes initiatives ont été lancées pour améliorer l’accès des populations du Sud à des médicaments de qualité à moindre coût. Une baisse drastique du prix des médicaments antirétroviraux a suivi l’entrée sur le marché de fabricants de médicaments génériques (Brésil et Inde) et la vente de certains médicaments à des prix équivalents à ceux des génériques par les grands laboratoires pharmaceutiques. Le droit des pays en développement de recourir à des licences obligatoires pour la production ou l’importation de médicaments génériques, un des principes de Doha, a été intégré dans les accords ADPIC (Aspects des Droits de Propriété Intellectuelle qui touchent au Commerce) de l’Organisation Mondiale du Commerce en 2005.

L’accès des pays et des populations aux nouvelles molécules brevetées, notamment les médicaments de deuxième ligne pour le traitement du VIH/Sida ou du paludisme, est cependant encore très limité et dépendant des instruments financiers internationaux. Ces nouveaux médicaments sont pourtant nécessaires face au développement des résistances aux médicaments. La facilité internationale pour l’achat de médicaments (UNITAID), soutenue par la France et divers pays, vise précisément à augmenter et sécuriser les financements alloués à l’achat de médicaments et tests pour le VIH/Sida, la tuberculose et le paludisme, ce qui devrait entraîner une diversification de l’offre et une diminution des prix.

Plusieurs initiatives se développent également dans le domaine de la recherche. Le mécanisme de promesse d’achat de vaccins (advancemarketcommitment), proposé par l’Italie, vise à créer un marché suffisamment solide (grâce aux contributions des donateurs) pour stimuler l’investissement privé dans la recherche et accélérer l’introduction de nouveaux vaccins. Enfin, un certain nombre d’acteurs (fondations privées, partenaires bi- et multilatéraux) appuient, en partenariat avec l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la recherche et le développement de nouvelles molécules pour lutter contres les maladies négligées par l’industrie pharmaceutique.

Faible utilisation des services publics de santé et développement non régulé du secteur privé

Les carences des services publics ont entraîné une forte croissance de l’offre de soins privée lucrative. Les malades, y compris les plus pauvres (parfois au prix de lourds sacrifices pour l’ensemble du ménage), se tournent vers les services privés « formels » lorsqu’ils existent et qu’ils sont abordables ou vers la médecine traditionnelle et le secteur « informel », où un personnel, souvent de statut public, et plus ou moins qualifié, exerce à titre privé. Selon l’OMS, seul le tiers ou le quart de la population dans les pays pauvres fréquente les centres publics de santé.

Dans les Pays les Moins Avancés (PMA), l’offre privée « formelle » est principalement concentrée en milieu urbain. Dans les Pays à Revenu Intermédiaire (PRI), elle est souvent prédominante et constitue le recours privilégié aux soins pour les classes moyenne et supérieure. La qualité de l’offre privée est cependant souvent très variable, le meilleur pouvant côtoyer le pire. Pour l’Etat, comme pour les organisations professionnelles, la régulation de ce marché est difficile, de même que son intégration dans une offre de soins globale où secteur public et secteur privé exerceraient en complémentarité. Les « partenariats public privé » ne sont encore qu’embryonnaires, les autorités sanitaires nationales ne s’étant pas encore affranchies du modèle d’offre de soins « tout public ».